Le lac
Yana Vagner
Le Lac est la suite du roman Vongozero. Si
vous n’avez pas lu ce livre, ne lisez pas cette chronique et allez plutôt
consulter mon article ici pour éviter toute information susceptible de briser
le suspense du tome 1 !
Anna et ses compagnons ont finalement atteint Vongozero
après des semaines de fuite effrénée. Cependant, leur arrivée à destination ne
signifie pas que leur vie soit de tout repos. Les survivants sont entassés dans
une cabane minuscule, exposés au froid, au manque de nourriture, d’intimité,
d’espace. Plus les jours passent, moins Anna supporte la présence de ses
voisins qu’elle déteste et de l’ex-femme de son mari, Irina, qui est si
mystérieuse. Sans compter que nulle échappatoire n’est possible, car au-dehors,
la maladie est loin d’avoir fini de décimer la population. La venue d’étrangers
va alors bouleverser la vie des survivants de Vongozero. Ils vont devoir
traiter avec les nouveaux venus pour le meilleur, comme pour le pire.
Dans ma précédente chronique, j’avais dit que la fin de
Vongozero se suffisait à elle-même. Pourtant, je n’étais pas mécontente de
retrouver les personnages du tome 1 ! L’auteur parvient immédiatement à
nous replonger dans l’ambiance oppressante du premier livre. Nous ressentons le
confinement éprouvé par Anna et nous désirons nous échapper avec elle. Cette
atmosphère est presque pire car, dans un premier temps, les protagonistes
étaient en voiture alors qu’à présent, ils ne quittent plus leur île. Les
femmes notamment, sont confinées à l’intérieur de la bâtisse et doivent s’occuper des
enfants et de la cuisine, ce qui rend l’atmosphère irrespirable.
Pour ceux qui craindraient de se lasser de cette ambiance,
sachez que peu à peu, l’auteur va apporter des changements à son intrigue. Pour
commencer, l’arrivée d'étrangers va bouleverser le quotidien du groupe. Cela
va également permettre de mettre en valeur le personnage d’Anna puisqu’elle est
particulièrement appréciée des nouveaux venus, ce qui vaut aux survivants une
aide précieuse.
De plus, si dans le tome 1 notre héroïne avait dû mal à
faire entendre sa voix, elle va connaître une évolution, notamment à cause de
l’oppression qu’elle ressent en permanence au quotidien. Vivre toute la journée
aux côtés de femmes qu’elle déteste va peu à peu la rendre presque folle et la
faire sortir de ses gonds, au point de jeter une assiette à la tête de ses
camarades. Elle va également pouvoir enfin exprimer son désir de ne plus vivre
confinée à Sergueï. Même si ce changement d’attitude n’aura pas tout
de suite l’effet escompté, il est plaisant de voir Anna s’affirmer.
La jeune femme parvient aussi à se détacher davantage de son
époux et à se montrer plus indépendante, plus forte, plus froide.
Il y a également un passage que j’ai considéré comme un
tournant du récit, celui où toutes les femmes se confient autour d’un verre
d’alcool. Alors que les hommes sont partis en mission, elles vont peu à peu
ouvrir leur cœur, ce qu’elles n’avaient jamais fait alors qu’elles se
connaissent depuis longtemps. Même si cela n’empêchera pas Anna de déménager
dans une autre demeure, ces confessions vont améliorer les relations entre
toutes les femmes, ce qui est très intéressant et rend l’atmosphère du livre
plus respirable.
Cela donne également de l’épaisseur aux personnages, notamment
à ceux de Marina, Natacha et Irina, qui n’étaient finalement pas beaucoup
exploités dans le tome 1.
Au niveau des personnages, j’ai beaucoup d’affection pour
Anna, que je trouve très réaliste et novatrice, loin des stéréotypes de
l’héroïne de dystopies habituelles. Grâce à cela, nous pouvons facilement nous
identifier à elle et compatir à ses malheurs. J’ai aussi beaucoup aimé
retrouver le vieil et bourru Boris.
En revanche, je n’ai pas du tout apprécié Sergueï, que j’ai
trouvé très égoïste et peu soucieux du bonheur de son épouse. Alors qu’Anna
finit par exploser à force de vivre enfermée avec des personnes qu’elle ne peut
supporter, ce-dernier ne veut pas faire d’efforts pour changer les choses. Il
faut que son ex-femme Irina se mette du côté de la jeune femme pour qu’il
prenne une décision.
Une fois encore, la relation entre les deux femmes est très
différente de ce à quoi on pourrait s’attendre. Il n’y a pas de scènes brutales
entre elles, pas d’horribles disputes, simplement une tension permanente. Cette
tension va cependant peu à peu se dissiper pour devenir une complicité, une
bonne entente, notamment à la fin du livre. A plusieurs reprises elles vont se
soutenir mutuellement. Elles vont finir par former une sorte de famille. Cet
aspect du récit m’a beaucoup plu, j’ai trouvé cela très original.
Enfin, le fait que le principal élément perturbateur de ce
tome soit de nouveaux arrivants n’est pas du tout ennuyeux, au contraire, je
trouve que cela renforce l’originalité de l’œuvre. En effet, avec l’arrivée du
virus dans le tome 1, on pourrait s’attendre à des mutations génétiques créant
des espèces de zombies comme dans d’autres dystopies, mais l’auteure ne
s’attarde pas sur la raison de la propagation de la maladie. Elle nous livre
simplement des détails sur les symptômes nous informant de sa présence.
Cela permet de souligner le fait que le plus grand danger
pour l’homme est l’homme lui-même. A l’heure du chaos, la loi du plus fort
renaît, tout s’achète et se négocie. Yana Vagner arrive à créer une tension
dans le récit.
Je recommande donc chaudement la lecture de ce tome 2 pour
l’évolution des personnages, notamment celui d’Anna, et la relation entre Anna
et Irina. Ce roman est addictif, nous ne pouvons nous arrêter de le lire une
fois commencé !
Le Lac de Yana Vagner publié aux éditions Pocket.
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