Le Cercle
Dave Eggers
Mae Hollande se languit dans la boîte minable où elle
travaille. C’est pourquoi lorsque son amie Annie lui propose un emploi au
Cercle, une société spécialisée dans la communication et les réseaux sociaux,
elle accepte avec joie.
La jeune femme occupe d’abord un poste dans le Service
Client où elle doit répondre le plus rapidement possible à des demandes en tous
genres, puis elle monte progressivement en grade et aide à élaborer divers
projets tels que Démopower, un système permettant de voter en temps réel. Elle adopte le principe de la Transparence et accepte d’être filmée
vingt-quatre heures sur vingt-quatre par une caméra diffusant les images en
direct sur Internet.
Bientôt, toute la population pourrait bien être sous le
contrôle du Cercle. Mae va-t-elle aider l’entreprise à atteindre la Complétude
ou écoutera-t-elle les avertissements de son ex-petit ami Mercer et du
mystérieux Kalden ?
J’ai beaucoup aimé le roman de James Eggers. Tout d’abord,
le récit se déroule à notre époque, ce qui est plutôt rare dans une dystopie. Nous assistons à la création de ce qui pourrait bien devenir une dictature, si
le Cercle parvenait à mettre ses projets à exécution.
L’auteur instaure une ambiance assez stressante, notamment
lorsque nous suivons la vie de Mae au travail. Les dirigeants de l’entreprise
demandent à leurs employés une somme d’efforts considérables : ils doivent
pouvoir gérer de nombreuses demandes en même temps. Sans compter qu’en plus de
leurs tâches quotidiennes, ils sont fortement incités à participer aux activités
organisées par le Cercle le week-end. Au final, les travailleurs ne trouvent
plus de raisons de quitter leur entreprise et dorment dans de luxueux dortoirs
prévus à cet effet.
Le personnage de Mae est également très intéressant. Cette
jeune femme est ambitieuse et désire que tout soit ordonné, elle aime être vue
et appréciée, c’est pour cela qu’elle adhère facilement à la philosophie du Cercle
qui désire tout rendre visible, comme le prouve l’un de ses slogans :
« les secrets sont des mensonges ».
/!\Je vais développer davantage mes pensées sur le
personnage de Mae, je vous conseille donc de sauter ce passage si vous n'avez pas lu le livre.
L’héroïne fait vraiment
le sel de ce roman. En effet, il est rare de voir dans une dystopie un
protagoniste qui ne se rebelle pas contre le système mais au contraire le
soutien et le perfectionne. La jeune femme a un caractère complexe, elle dégage
à la fois une certaine candeur, mais dans le même temps elle est débordante
d’ambition. Quand elle était petite, Mae a été négligée par ses parents, puis elle s’est ennuyée dans l’entreprise dans
laquelle elle exerçait avant d’entrer au Cercle. Elle est donc débordante d’envie, de projets, elle désire faire ses preuves.
Mae a aussi tendance à ne
pas prendre en compte les doutes et les remarques des autres : elle
méprise son ex-petit ami Mercer lorsqu’il tente de lui montrer la perversité du
Cercle, elle n’écoute pas les doutes de ses parents qui ne veulent plus être
filmés vingt-quatre heures sur vingt-quatre comme elle.
D’ailleurs, lorsque le
jeune homme finit par se suicider faute de pouvoir échapper à la surveillance
de la boîte, elle ne ressent que peu de tristesse. Elle parvient avec facilité
à s’auto convaincre qu’elle agit pour le mieux ! Mae se compare même à une
présidente, en effet, elle explique que le fait d’être filmée en permanence lui
impose un contrôle sur elle-même et lui donne aussi du pouvoir.
Enfin, la fin du roman
nous montre bien le vrai visage de la jeune femme : elle trahit Kalden, le
mystérieux collègue qui désire empêcher le Cercle de prendre le contrôle du
monde, en le dénonçant à ses supérieurs.
/!\ Fin de la partie spoilers
Les dernières pages du
livre sont proprement terrifiantes.
Le Cercle de Dave Eggers publié aux éditions Gallimard.
Le Cercle a été adapté en film avec dans le rôle de Mae
l’actrice Emma Watson. Si le jeu de la jeune femme est bon, les scénaristes ont
fait planer une ambiguïté inutile sur le personnage de Mae. En effet, nous
avons l’impression que, au cinéma, l'héroïne va se révolter contre le
système, alors que dans le roman au contraire, elle se persuade tout au long du
livre que ce qu’elle fait est la bonne décision. A cause de ce flou autour du
personnage, la fin du film paraît étrange et illogique.
De plus, de légers
changements sont effectués au niveau de l’apparition de certains personnages
notamment de Mercer. Ces modifications peuvent sembler anodines mais changent
considérablement la perception du récit et des protagonistes. Le film est donc
plutôt une déception.